Google et les agences – la transparence de la chaîne de valeur en question
L’opacité de la chaîne de valeur du marketing digital est un sujet de débat continuel, j’ai déjà eu l’occasion d’écrire un article à ce sujet dans La Tribune).
Après des années sous le tapis, le sujet est de plus en plus débattu, poussé le poids croissant des dépenses de marketing digital dans les comptes des annonceurs.
Geneviève Petit de Petitweb remet le sujet sur le devant de la scène dans un éditorial sobrement nommé « Confusion » en donnant donne la parole à des acteurs du secteur, qui vivent la question de l’intérieur (NDLR : trois des intervenants le font de façon anonyme, ce qui en dit long sur la notion de transparence :- ) )
(Last minute : l’ami Nicolas Jaimes fait également un papier là dessus dans Minted)
https://www.mntd.fr/adtech/exclu-minted–la-google-dependance-des-agences–755486
Ce post a pour objet de synthétiser le sujet et, n’ayant pas été interrogé par Geneviève, de donner mon avis au passage.
Le point de départ
Un post de Robert Webster, ancien Directeur Data de Mediacom (agence media globale du groupe WPP) et fin connaisseur du sujet (post commenté ici sur Petitweb).
Qu’est-ce que dit Robert Webster ?
- Google est archi-dominant dans la pub sous toutes ses formes mais contrôle également les outils de mesure (Google Analytics) et se positionne sur l’identification post-cookie (Google Sandbox). Les interconnexions avec les technologies tierces sont compliquées -> c’est le principe même du Walled Garden
- De nombreuses agences dominantes (média ou tech) ont des accords de revente avec Google, qui leur génère un important flux de revenu via des commissions et du service lié au rôle d’intégrateur des technologies
- Les conseillers d’agence média – sans connaissances techniques – sont donc poussés à vendre aux clients des produits comme Cloud Platform ou Big Query
- Tout ceci conduit à enfermer de plus en plus les annonceurs dans une dépendance à Google alors que la logique voudrait que sa position dominante soit challengée par ceux qui en paient le prix
- La conclusion de Robert est qu’il n’y a pas de problème à conseiller des technologies si on y connait quelque chose mais surtout si on fait ça en toute impartialité
Un état des lieux globalement à charge donc …
Réactions françaises
La réaction d’intervenants du marché français (à lire ici sur Petitweb) va globalement dans le même sens .
Quelques éléments notables à mon sens :
- Les agences média font la mesure et le reporting parce qu’elles disposent des outils,. Mais en ce faisant elles sont juges et parties. (Pierre Harand de 55)
- Diminuer d’un tiers ses investissements sur les deux plateformes (ie Google et Facebook), suite à des tests et des process remettant en cause la place centrale de Google dans l’écosystème (anonyme, grand annonceur, ancien d’agence média)
- Un autre témoignage d’agence média (anonyme) décortique le système de notation que Google fait de ses agences partenaires : Les plateformes évaluent notre compétence à utiliser leurs outils et à acheter, font passer des diplômes et imposent un nombre d’équipes “certifiées” pour obtenir des badges. Elles nous attibuent 2 étoiles sur tel aspect, 5 étoiles sur un autre, et les 5 étoiles, c’est quand on a investi sur Youtube ! C’est une sorte de lavage de cerveau.
- Le marché passe par DV360 à 95 %. La répartition des billing par console d’achat devrait être une donnée publique, exigée par les annonceurs de leurs agences média. Depuis sept ans, les plateformes ont resserré leur emprise technologique sur les agences média. (anonyme, plateforme techno concurrente de Google DV 360)
Mon propre avis
Google a certes une position dominante mais ils font aussi de très bons outils, fiables et bien documentés. Que Google cherche à pousser son avantage jusqu’au bout, c’est assez logique, toutes les entreprises font de même (ceci est valable pour Facebook).
La position des agences média est plus ambigüe, elles sont très challengées sur leur business model d’origine qui consistait à se rémunérer par des commissions sur les diffusions en plus des honoraires mais les annonceurs font pression pour avoir plus de transparence. Google et Facebook ne versant pas de commissions sur les diffusions, la manne de la vente de technologies est probablement un bol d’air financier bienvenu pour les agences.
Pour autant, il y a un problème d’impartialité et de transparence : à partir du moment où une agence maîtrise une techno et a un intérêt financier à la vendre, elle risque de pousser la vente mais est-ce vraiment ce dont a besoin son client ?
Je constate néanmoins que le marché est en train de bouger. Les annonceurs ont de plus en plus conscience de la nécessité de superviser eux-mêmes l’emploi de leurs budgets média et de faire leurs choix technologiques, en toute transparence et en toute indépendance.
Le mouvement d’internalisation des compétences est en marche depuis quelques années. Et même si un annonceur n’a pas les moyens d’embaucher des spécialistes, il parait indispensable de se doter des plateforme de mesure de la performance média et de reporting indépendantes des agences et des plateformes publicitaires.
Avec plus de transparence, l’annonceur est en capacité d’infléchir les choix de campagnes mais également les choix technologiques de ses prestataires.
Fournir un outil de mesure du média digital, transparent et indépendant des plateformes et des agences, c’est précisément ce qu’on fait chez Adloop.
CQFD 😉
Stéphane Gendrel, Fondateur d’Adloop