Fin des cookies tiers : quelles conséquences pour la mesure post view ? et la mesure Ad Centric en général ?
Sale temps pour les cookies ! Chrome annonce la fin du suivi des cookies tiers d’ici deux ans, condamnant ainsi quasiment la mesure post-view et par tant une grande partie de la mesure dite Ad centric. Heureusement, des alternatives existent (surtout chez nous 🙂 )
Décidément, il ne fait pas bon être un cookie tiers (aka Third Party Cookie) de nos jours. Après un ratiboisage en règle par les uns et les autres en 2019, Google vient de sauter le pas et d’annoncer son intention de bannir les cookies tiers de son navigateur Chrome d’ici deux ans.
Un coup très dur pour le marché publicitaire car en réalité il n’y a pas vraiment d’alternatives crédibles pour la plupart des technos. Ces petits fichiers – par ailleurs inoffensifs – restent le seul moyen efficace pour identifier les utilisateurs à travers plusieurs sites (cross-domain tracking) et sont la pierre angulaire de la publicité ciblée et de la mesure d’efficacité dite Post-View.
Le précédent Safari l’a bien montré (les cookies tiers y sont exclus depuis l’arrivée du programme ITP, Intelligent Tracking Prevention), la disparition des cookies tiers ébranle toute une économie.
A commencer par les éditeurs vivant de la publicité qui n’arrivent plus à monétiser correctement leur inventaire, faute de pouvoir y proposer de la publicité ciblée. Prisma Media a récemment expliqué que ses CPM avaient chuté de près de 40% depuis l’arrivée d’ITP au sein de Safari.
Mais la pilule sera tout aussi difficile à avaler du côté des acteurs de la diffusion publicitaire – plateformes, ad servers ou agences – qui perdront l’élément principal de valorisation des campagnes via le Post-View.
Nous avons déjà pointé les limites de cette méthodologie qui est un peu utilisée n’importe comment. Il n’empêche qu’elle est abondamment utilisée pour valoriser l’impact des 99,9% d’impressions publicitaires qui ne génèrent aucun clic. Le problème, c’est qu’elle repose entièrement sur une mesure dite “Ad-Centric”.
Explications techniques
A chaque fois qu’il diffuse une nouvelle publicité, l’Ad Server dépose au passage un cookie tiers pour identifier l’utilisateur exposé. Dans l’extrême majorité des cas (999 cas sur 1000 rappelons-le), l’utilisateur ne clique pas sur la publicité mais si d’aventure il visite le site de l’annonceur, le cookie publicitaire est lu par un tag de l’Ad Server qui enregistre certaines actions (notamment les ventes ou autres conversions). Le rapprochement entre l’exposition et la visite permet d’alimenter des statistiques beaucoup plus valorisantes que les statistiques post-clic.
Un peu de maths pour bien comprendre
L’unité de compte des impressions publicitaires est le millier.
Prenons donc 1.000.000 d’impressions (ie. Pubs affichées) et pour l’exemple, admettons qu’il y ait 1.000.000 d’utilisateurs exposés (1 utilisateur par impression). Notez qu’on se fiche de savoir s’ils ont vu la publicité, le cookie publicitaire est déposé quoi qu’il arrive.
Le taux de clic moyen est de 1 pour 1.000 et le taux de conversion moyen de 1%.
On a donc pour le million d’impressions : 1.000 visites et 10 ventes, post-clic.
En revanche, il reste 999.000 internautes ayant un cookie publicitaire mais n’ayant pas cliqué.
Quelle est la probabilité que ceux-ci visitent le site de l’annonceur ayant diffusé la publicité ? Impossible de le savoir bien évidemment mais l’expérience montre que pour 1 visite post-clic, les Ad Server peuvent revendiquer entre 5 et 10 visites post-view.
C’est à dire qu’entre 0,5 et 1% des 999.000 utilisateurs précités vont se rendre dans un intervalle de temps allant de 24h à 28 jours sur le site de l’annonceur.
Prenons 1% pour forcer le trait, nos statistiques de campagne seront renforcées de :
9.990 visites et 99,9 ventes, post-view cette fois-ci.10 fois plus qu’avec le post-click.
Autant dire que ça change RADICALEMENT la perception de l’efficacité de la campagne.
Vis ma vie d’agence média (pour ceux que les maths n’intéressent pas, voici une version en situation des stats précédentes).
Le discours du marketeur post-clic : « Bonjour Monsieur l’Annonceur, vous avez diffusé 1 million de pubs à 8 € le mille soit 8000 € de budget, vous avez fait 1000 visites soit 8 € la visite et obtenu 10 ventes à 50 € de panier moyen soit 500 € de CA. D’où un ROAS de 6%. Alors heureux 😊 ? Non ? Ah OK je prends la porte. »
Le discours du marketeur post-clic et post-view : « Qu’est ce que je vous avais dit ? Cette pub c’est de la bombe. 8.000 € investis, 11.000 visites, 110 ventes pour 5.500 € de CA. Elle est pas belle la vie ? Resignez là s’il vous plait »
Sueurs froides
On comprend bien que ça risque de devenir problématique si les cookie tiers disparaissent :
pas de cookie tiers = pas de cookie publicitaire = pas de visites ni de ventes post-view = statistiques nettement moins bonnes
Comment on fait alors ?
L’alternative qu’on aime pas …
Il faut savoir que ce changement technique va (encore) renforcer Google et Facebook car leur prédominance dans l’univers web leur permet de réconcilier impressions publicitaires et visites sans avoir recours aux cookies, ils utilisent des systèmes basés sur les utilisateurs identifiés (une majorité d’entre nous sont logués plusieurs fois par jour voire en permanence sur un service Google, Gmail ou Youtube ou sur Facebook / Instagram). Leurs technos publicitaires – déjà archi-dominantes – le seront encore plus.
Est-ce une bonne alternative … ? Mon avis personnel est clairement NON, on ne doit pas laisser Google et Facebook se juger eux-mêmes (cf cet article).
L’alternative qu’on préfère …
C’est d’admettre que le post-view est au mieux très accessoire et que sa future disparition n’est pas forcément une mauvaise nouvelle. Je sais que je force le trait et que je ne vais pas me faire que des amis mais quand on y réfléchit : le post-view c’est tiré par les cheveux.
Que faire donc ? Chez Adloop, on ne change pas notre positionnement d’un iota. On ne veut pas réinventer la roue, en l’occurrence la mesure post-view, car on ne pourra bientôt plus mesurer ces impressions non cliquées.
Ce que l’on propose en revanche, c’est de mesurer plus intelligemment celles qui ont généré des clics. Si on part du postulat que le display ne convertit que très peu mais qu’il permet de générer des visites de qualité, on va donc s’attacher à regarder toute une série d’indicateurs de haut ou milieu de funnel.
Par exemple : le coût par nouveaux visiteurs (même si le taux de rebond est important) pour un annonceur qui veut attirer de nouvelles audiences. Ou encore le coût par visites utiles (consultation de deux ou trois pages produits, mise en panier) pour les annonceurs qui se concentrent sur l’engagement.
En couplant algorithmie et échantillonnage, chaque annonceur sera à même d’identifier au sein d’un canal (le Display par exemple) quels sont les Placements (un placement = une créa sur une audience donnée) les plus performants et ceux les moins performants afin d’optimiser son plan média en conséquence.
Et enfin, mais cela dépasse de loin la problématique de la mesure d’audience, les marques doivent absolument développer une politique de first party data en interne pour arrêter de dépendre des plateformes publicitaires.